Variant Omicron : ce que l’on sait de l’activité neutralisante des anticorps, du risque de réinfection et de l’efficacité des vaccins

Illustration d’une particule virale de SARS-CoV-2 entourée d’anticorps © Imperial College London

Initialement détecté au Botswana et en Afrique du Sud, le variant Omicron (B.1.1.529) est le cinquième variant préoccupant depuis le début de la pandémie Covid-19 due au SARS-CoV-2*. C’est également celui qui inquiète le plus les virologistes, immunologistes et épidémiologistes. En effet, plusieurs études in vitro indiquent que les nombreuses mutations présentes dans la protéine spike du coronavirus ont pour conséquence de réduire la capacité de neutralisation des anticorps dirigés contre ce nouveau variant.

Ces travaux s’ajoutent à des données issues du programme national sud-africain de surveillance épidémiologique qui rapportaient un risque accru de réinfection associé à ce nouveau variant. Cette étude, qui consistait en une analyse rétrospective des données épidémiologiques, suggérait qu’Omicron possède une capacité accrue à entraîner une réinfection chez des individus préalablement infectés. En d’autres termes, les auteurs estimaient que le variant Omicron est capable d’échappement immunitaire, ce que confirment donc de nouveaux résultats obtenus en laboratoire par des équipes basées en Afrique du Sud, en Suède, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Autriche et aux États-Unis.

Deux groupes d’Omicron

Il s’avère par ailleurs que l’analyse phylogénétique montre que la population du variant Omicron est composée en réalité de deux groupes. Le groupe majoritaire (BA.1) comporte les mutations caractéristiques de ce nouveau variant. Existe également un groupe minoritaire (BA.2) qui partage des mutations avec Omicron mais aussi quelques différences, notamment l’absence de la délétion en position 69-70 dans la protéine spike (qui a comme conséquence une absence de détection du gène S (S gene target failure ou SGTF) aux tests PCR couramment utilisés. Le groupe BA.2, dont peu de séquences génomiques sont disponibles, n’a pas encore été observé au Royaume-Uni. Dans ce pays, le taux de détection de SGTF, en tant que marqueur indirect (proxy) du variant Omicron, a quasiment été multiplié par cinq entre le 20 novembre et le 5 décembre 2021.

L’Agence britannique de sécurité sanitaire (UK Health Security Agency, UKHSA) estimait, au vu des taux de détection de SGTF, qu’environ 1,6 % de tous les cas de Covid-19 détectés sur les prélèvements réalisés le 3 décembre étaient très probablement dus au variant Omicron. Par ailleurs, au Royaume-Uni, le temps de doublement des cas dus à Omicron est estimé à 2,5 jours.

Un avantage de transmissibilité par rapport à Delta

Au Royaume-Uni, les données épidémiologiques obtenues dans le cadre familial et auprès de sujets contacts d’un cas index infecté par Omicron montrent un taux de transmission plus élevé qu’en cas d’infection par le variant Delta. Les taux d’attaque secondaire seraient donc supérieurs, même s’il convient à ce stade d’être prudent dans la mesure où la recherche des cas contacts est sans doute plus poussée autour des cas d’infection par ce nouveau variant. Il est à noter que ces études préliminaires n’ont pas intégré certains paramètres importants. En effet, les résultats n’ont pas été ajustés en fonction du statut vaccinal ou de l’existence d’infection antérieure par le SARS-CoV-2.

Proportion des infections dues au variant Omicron estimée à partir de tous les prélèvements avec SGTF, en fonction d’un temps de doublement estimé à 2,5 jours. De tels échantillons biologiques sont maintenant hautement prédictifs d’Omicron. @ UKHSA

Dans son dernier rapport technique en date du 10 décembre 2021, l’Agence britannique de sécurité sanitaire indique que 19 % des cas index Omicron ont donné lieu à un cas secondaire familial contre 8,2 % avec un cas index Delta.

L’analyse statistique, après ajustement sur divers paramètres (âge, sexe, groupe ethnique, type de résidence, nombre de sujets contacts familiaux, région), montre que le risque de transmission dans le foyer familial à partir d’un cas index infecté par le variant Omicron apparaît être 3,2 fois supérieur à celui observé pour un cas index dû au variant Delta. De même, le risque qu’un sujet contact devienne un cas secondaire confirmé est 2,09 fois plus élevé avec Omicron qu’avec Delta. Enfin, au sein du foyer familial, le taux d’attaque secondaire évalué à partir des données du contact tracing en routine, est de 21,6 % avec le variant Omicron (versus 10,7 % avec Delta).

L’ensemble de ces données préliminaires semble donc indiquer l’existence d’un avantage de transmissibilité d’Omicron par rapport à Delta. Les experts britanniques font remarquer qu’il est possible que cette analyse ait pu être affectée par une vérification plus poussée des cas d’Omicron, mais notent que la plupart des notifications de transmissions dans les foyers familiaux sont antérieures au début de la recherche améliorée des sujets contacts concernant Omicron. En tout état de cause, ajoutent-ils, l’analyse de la transmissibilité de ce nouveau variant dans le cadre familial devra être poursuivie afin d’améliorer sa précision.

Une vague d’Omicron pourrait s’ajouter à la vague de Delta

Les données issues des tests réalisés en population générale font également état d’un avantage de croissance d’Omicron. « La proportion de cas d’infection avec SGTF (qu’on considère donc comme hautement prédictifs d’Omicron) continue de croître rapidement. Le taux de croissance estimé d’Omicron, basé sur le nombre ajusté de SGTF, est de 0,35 par jour. Si Omicron continue de croître au rythme actuel, le nombre de cas Omicron devrait atteindre la parité avec les cas Delta – en l’occurrence un nombre équivalent de cas – à la mi-décembre », souligne la UKHSA. Autrement dit, une vague d’Omicron pourrait donc rapidement s’ajouter à l’actuelle vague de Delta.

Les experts britanniques estiment que le temps de génération (nombre de jours entre le moment où une personne est infectée et celui où elle infecte une autre personne) est de 5,2 jours. Et d’en déduire que le taux de reproduction effectif serait de 3,7.

Forte réduction de la capacité neutralisante des anticorps

À ce jour, plusieurs études préliminaires internationales ont rapporté une réduction de 20 à 40 fois de la capacité neutralisante des sérums de sujets vaccinés avec deux doses de Pfizer par rapport aux variants antérieurs. Cette réduction est au minimum de 10 fois en comparaison avec le variant Delta.

Quant aux deux études britanniques, réalisées par la UKHSA et l’université d’Oxford, elles rapportent une baisse plus de 20 fois moindre.

Une réduction plus importante de la capacité de neutralisation a été observée avec le sérum de sujets vaccinés avec deux doses d’Astra Zeneca, avec dans de nombreux cas une activité neutralisante se situant même en deçà de la limite de quantification du test de neutralisation. L’administration d’une dose de rappel par un vaccin à ARN messager a entraîné une augmentation de l’activité neutralisante quel que soit le schéma vaccinal antérieur. Dans la mesure où ces résultats ont été obtenus peu de temps après la dose de rappel, il est absolument nécessaire de disposer de données sur un plus long terme afin d’évaluer la durée de la capacité neutralisante des anticorps générés par un schéma vaccinal à trois doses.

Les tests évaluant la capacité de neutralisation par les anticorps ont utilisé des sérums provenant de sujets Covid-19 convalescents et d’individus vaccinés vis-à-vis du variant Delta. Les résultats ont été publiés sous forme de preprints, non encore évalués par les pairs. Certaines études ont été réalisées en utilisant des pseudotypes, c’est-à-dire des virus artificiellement porteurs à la surface de mutations de la protéine spike du SARS-CoV-2 et qui miment donc le variant en question. D’autres ont été effectuées, dans des laboratoires de haute sécurité, sur des virus vivants authentiques.

Bien que les méthodologies diffèrent et que les sérums proviennent de différentes catégories de sujets et de patients, ces résultats montrent tous une diminution de la capacité neutralisante des anticorps dirigés contre le variant Omicron par rapport aux autres variants du SARS-CoV-2.

Une étude sud-africaine, conduite par l’équipe d’Axel Sigal (Africa Health Research Institute, Durban), montre que la neutralisation du virus par des sérums provenant de personnes ayant été infectées avant d’être complètement vaccinées reste efficace contre ce nouveau variant. En revanche, chez les sujets uniquement vaccinés avec deux doses de vaccin Pfizer, la capacité neutralisante des anticorps vis-à-vis du virus vivant Omicron peut être jusqu’à 41 fois inférieure à celle vis-à-vis du variant vivant Delta.

De même, les résultats préliminaires, non encore publiés mais diffusés sur Twitter par la virologue Sandra Ciesek (Francfort, Allemagne), vont dans le même sens. Elle note également que le pouvoir neutralisant des anticorps produits après une double dose de vaccin est diminué de 40 fois par rapport à Delta. Elle souligne par ailleurs que seulement 25 % des personnes doublement vaccinées avec le vaccin Pfizer puis infectés possèdent un sérum ayant une activité neutralisante vis-à-vis d’Omicron. Ce chiffre est le même pour les personnes ayant reçu un rappel avec le vaccin Pfizer depuis trois mois, après une double vaccination Pfizer. Il passe en revanche à 70 % deux semaines après un rappel avec Pfizer faisant suite à une vaccination avec deux doses de Moderna.

Une étude autrichienne, conduite par Annika Rössler et Janine Kimpel (université médicale d’Innsbruck) et publiée le 11 décembre sous forme de preprint sur medRxiv, confirme que le variant Omicron échappe à la neutralisation par les sérums de personnes doublement vaccinés et ceux de sujets convalescents. En revanche, elle indique que tous les sérums des individus qui ont été infectés puis vaccinés deux fois par le vaccin Pfizer, ou qui ont été vaccinés et ensuite infectés, ont réussi à neutraliser Omicron, mais à un degré moindre que ce qu’on observe avec le variant Delta.

Quid de l’efficacité vaccinale contre une infection symptomatique par Omicron ?

Mais qu’en est-il de la capacité des vaccins à protéger d’une infection symptomatique par Omicron ? Des données préliminaires obtenues par une étude britannique indiquent que l’efficacité vaccinale est significativement inférieure vis-à-vis d’une infection symptomatique par Omicron par rapport à l’infection par Delta, que les personnes aient reçu le vaccin d’Astra Zeneca ou celui de Pfizer. En d’autres termes, deux doses de vaccin s’avèrent insuffisantes pour conférer un niveau de protection adéquat contre une forme légère de Covid-19 due au variant Omicron. En revanche, un rappel avec le vaccin Pfizer permet d’augmenter ce taux de protection.

L’Agence britannique de sécurité sanitaire a évalué l’efficacité vaccinale de deux doses du vaccin Pfizer et Astra Zeneca contre la maladie Covid-19 symptomatique, avec et sans rappel Pfizer. Le rappel, qui consistait en une troisième dose administrée au moins 140 jours après la seconde, a été réalisé après la mi-septembre 2021.

L’analyse a inclus 56 439 cas d’infection par Delta et 581 cas d’infection par Omicron. Seuls les prélèvements réalisés après le 27 novembre ont été inclus dans cette analyse car cela correspond à la période durant laquelle la présence de SGTF au test PCR est devenue prédictive de celle du variant Omicron.

Efficacité vaccinale vis-à-vis de la maladie symptomatique après la seconde dose et la dose de rappel (3e dose) pour les sujets ayant reçu le vaccin Astra Zeneca (à gauche) ou le vaccin Pfizer (à droite). Dans les deux cas, le rappel a consisté à administrer le vaccin Pfizer. Concernant les personnes vaccinées avec le vaccin Astra Zeneca, l’efficacité vaccinale est passée à environ 71 % (IC95% : 41,8-86,0%) deux semaines après le rappel avec le vaccin Pfizer. Elle atteignait environ 76 % (IC95% : 56,1-86,3%) chez celles qui avaient été vaccinées avec deux doses du vaccin Pfizer. Andrews N, et al. @ UKHSA

Il n’a pas été observé de protection contre la maladie symptomatique due au variant Omicron durant les 15 semaines suivant la seconde dose chez les individus qui avaient reçu deux doses de vaccin Astra Zeneca.

Parmi les personnes ayant reçu deux doses du vaccin Pfizer, l’efficacité vaccinale a été de 88 % durant une période de 2 à 9 semaines après la deuxième dose, chutant à 48 % entre la 10e et la 14e semaine après la deuxième dose, puis déclinant encore entre 34 % et 37 % 15 semaines après la deuxième dose.

Chez les personnes ayant reçu deux doses du vaccin Astra Zeneca, l’efficacité vaccinale a été portée à 71,4 % deux semaines après un rappel avec le vaccin de Pfizer. Chez les sujets qui avaient été complètement vaccinés avec Pfizer, l’efficacité vaccinale a atteint 75,5 % après le rappel avec ce même vaccin.

En résumé, une efficacité vaccinale modérée à élevée contre l’infection légère, car de l’ordre de 70 % à 75 %, a donc été observée pendant une courte période après le rappel (3e dose) suivant un schéma vaccinal complet avec Pfizer ou Astra Zeneca. À ce stade, on ne dispose donc pas d’informations sur la durée de la protection conférée par le rappel.

Quant à Pfizer, la firme a fait savoir le 8 décembre par voie de communiqué de presse que les résultats d’une première étude en laboratoire montrent que « les anticorps sériques induits par le vaccin Pfizer-BioNTech COVID-19 (BNT162b2) neutralisent le variant Omicron du SRAS-CoV-2 après trois doses. Les sérums obtenus des personnes vaccinées un mois après avoir reçu la vaccination de rappel (troisième dose du vaccin BNT162b2) ont neutralisé le variant Omicron à des niveaux comparables à ceux observés pour la protéine spike du SARS-CoV-2 de type sauvage après deux doses ».

En raison du faible nombre de cas Omicron dans cette première analyse, les estimations de l’efficacité vaccinale contre Omicron comportent cependant un certain niveau d’incertitude avec de larges intervalles de confiance. Ils devront donc être affinés par des analyses ultérieures, soulignent Nick Andrews et ses collègues dans un preprint daté du 9 décembre.

Ces données vont dans le même sens que celles obtenues lors des tests de neutralisation effectués par des équipes sud-africaines, allemandes, suédoises et britanniques, qui indiquaient une réduction de l’activité neutralisante de 20 à 40 fois du sérum de sujets vaccinés avec deux doses du vaccin Pfizer par rapport aux souches ancestrales et d’au moins 10 fois en comparaison du variant Delta. Ces mêmes études avaient également observé une augmentation de la capacité de neutralisation des anticorps après la dose de rappel.

Les chercheurs n’ont pas été en mesure de déterminer la protection contre les formes graves de Covid-19 en raison à la fois du faible nombre de cas liés au variant Omicron et du décalage existant entre l’infection et la survenue d’une forme sévère de la maladie.

Même si ces résultats doivent être interprétés avec prudence en raison du faible nombre de patients inclus dans cette analyse, ces premières données semblent encourageantes dans la mesure où avec les variants antérieurs, l’efficacité vaccinale contre les formes graves, notamment contre l’hospitalisation et le décès, avait été supérieure à celle vis-à-vis des formes légères, indique le rapport de la UKHSA. Les chercheurs britanniques estiment donc, au vu de l’expérience acquise, qu’il en sera vraisemblablement de même avec Omicron. Et d’ajouter que cela prendra de toute façon du temps avant que l’on dispose de résultats fiables en matière d’efficacité vaccinale contre les formes sévères de Covid-19.

En résumé, les données de neutralisation in vitro n’impliquent pas une réduction de l’efficacité du vaccin contre les formes graves de Covid-19, dans lesquelles les réponses immunitaires à médiation cellulaire (lymphocytes B et T mémoires) interviennent également. Or l’évaluation de la réponse cellulaire est particulièrement laborieuse à mettre en évidence sur le plan expérimental.

Ces données préliminaires doivent cependant être confirmées par des études de plus grande envergure incluant des sérums provenant d’individus présentant des profils immunologiques différents (ayant reçu des vaccins différents, ayant ou non reçu un rappel, ayant antérieurement développé une maladie Covid-19 plus ou moins sévère), ainsi que des sérums collectés à des moments différents après l’infection et/ou après la vaccination, fait remarquer le Centre européen de contrôle et de prévention des maladies (ECDC) dans une note publiée en ligne le 10 décembre.

Premiers cas documentés d’infection post-vaccinale due à Omicron

Mais qu’en est-il de l’efficacité vaccinale vis-à-vis des formes symptomatiques plus légères ? Un élément de réponse vient d’être apporté par des chercheurs sud-africains qui présentent leurs données sur le site de prépublication SSRN montrant l’existance possible d’un échappement immunitaire chez des personnes complètement vaccinées.

Ces chercheurs ont fait état, pour la première fois, de cas d’infection par le variant Omicron en Afrique du Sud chez des individus complètement vaccinés et ayant reçu une dose de rappel. Ces patients, qui séjournaient au Cap, ont développé entre le 30 novembre et le 2 décembre, une Covid-19 avec des symptômes légers à modérés (mal de gorge, fatigue, tout sèche, maux de tête, congestion nasale, rhinite). Seul un patient a présenté de façon transitoire, le troisième jour, une anosmie et une agueusie (perte de l’odorat et du goût). Aucun patient n’a été hospitalisé.

L’ensemble de ces données cliniques semble indiquer qu’une vaccination complète suivie d’un rappel confère donc une bonne protection contre une forme sévère de Covid-19 dans la mesure où la symptomatologie a été modérée.

Ces données concernent un groupe de visiteurs allemands qui avaient donc reçu trois doses de vaccin. Ce groupe comprenait cinq femmes et deux hommes (d’âge compris entre 25 et 39 ans). Quatre d’entre eux travaillaient dans des hôpitaux locaux alors que les autres étaient en vacances. À leur arrivée en Afrique du Sud durant la première quinzaine de novembre, leur test PCR était négatif.

Six personnes avaient été complètement vaccinées avec le vaccin Pfizer. Cinq d’entre elles avaient reçu un rappel (3e dose) de Pfizer en octobre ou début novembre. Une autre personne avait reçu début octobre un rappel avec Moderna. Une septième avait reçu une première dose d’Astra Zeneca, une deuxième dose de Pfizer et un rappel avec Pfizer. Les doses de rappels avaient été administrées entre 5 et 10 mois après la deuxième dose. Aucun de ces individus n’avait développé d’infection antérieure par le SARS-CoV-2.

Chez cinq patients, l’infection a été confirmée par séquençage. Dans les deux autres cas, le séquençage n’a pas été possible, mais l’infection a été considérée comme étant due à Omicron au vu des liens épidémiologiques avec les autres patients.

Constanze Kuhlmann, chercheuse à l’université de Munich et ses collègues du Cap, ont évalué la charge virale de patients chez lesquels le variant Omicron a été capable d’échapper à l’immunité induite par la vaccination par ARN messager et à un rappel. Celle-ci était en moyenne de 4,16 x 107, avec un pic à 1,65 x 108 copies par mL dans l’écouvillonnage au quatrième jour après le début des symptômes. La charge virale était donc élevée chez ces patients. Là encore, soulignent les auteurs, ces données doivent être considérées avec prudence car préliminaires.

Ces données sur la charge virale de ces patients semblent faire écho à celles récemment obtenues au niveau national au Royaume-Uni. En effet, les valeurs du Ct dans les cas avec SGTF, marqueur indirect (« proxy ») de la présence du variant Omicron, diminuent rapidement depuis le 30 novembre, passant de 30 à 23. On rappelle que la charge virale est indirectement évaluée par le Ct (Cycle Threshold) qui est le nombre de cycles d’amplification pour atteindre le seuil de détection lors de la réaction PCR. Plus la valeur du Ct est basse et plus il y a de virus dans le prélèvement analysé. En comparaison, les valeurs Ct dans les cas où la PCR ne s’accompagne pas de SGTF (proxy du variant Delta) sont plus élevées, comprises entre 30 et 35. Sachant que lors des vagues précédentes, des valeurs de Ct déclinantes ont été observées chez les individus en période d’infection aiguë, ces données pourraient s’expliquer par l’actuelle croissance rapide, quasi-exponentielle, des cas liés au variant Omicron.

Nombre cumulé de cas par variant rapporté en fonction des jours ayant suivi l’identification initiale. La propagation communautaire du variant Omicron interpelle les experts britanniques qui note sa très forte croissance initiale par rapport à celle qui avait été observée avec les autres variants. @ UKHSA

Réinfections

Quid du risque de réinfection avec Omicron ? À ce propos, le rapport technique de l’Agence britannique de sécurité sanitaire fait état de cas de réinfection chez des individus ayant présenté une infection confirmée, hautement probable ou probable à Omicron, dont le prélèvement a été effectué entre le 1er novembre et le 3 décembre 2021. Parmi 329 personnes dans ce cas, 17 (4,9 %) avaient déjà été infectées.  Pour 16 d’entre elles, leur dernier test PCR positif pour le SARS-CoV-2 remontant à plus de 90 jours, elles ont donc été considérées comme ayant développé une réinfection. Chez un autre patient, il s’est écoulé 88 jours entre les deux tests PCR positifs.

Ces individus considérés comme réinfectés avaient un âge compris entre 23 et 57 ans (âge médian 37 ans). L’intervalle de temps entre une infection antérieure par le SARS-CoV-2 (selon les cas, par le variant Alpha ou Delta) et une réinfection par Omicron était compris entre 88 et 541 jours (durée médiane de 314 jours).

On ne peut pas conclure de ces données préliminaires qu’il existe globalement un risque accru de réinfection. Là encore, une surveillance épidémiologique à plus long terme s’impose.

L’ensemble des données, recueillies entre le 20 novembre et le 5 décembre et reposant sur le séquençage du génome entier, font état de 25 cas de réinfections par Omicron et de 366 réinfections par d’autres variants. L’analyse statistique indique que le risque de réinfection pour Omicron est 5,2 plus important que pour les autres variants**. Là encore, insistent les experts britanniques, ces estimations sont préliminaires.

Quid de la sévérité clinique ?

Reste enfin à déterminer quelle est la sévérité clinique des cas de Covid-19 dus au nouveau variant Omicron. Des informations anecdotiques et fragmentaires en provenance d’Afrique du Sud, reposant notamment sur un faible taux d’occupation de lits en soins critiques, un moindre recours à l’oxygénothérapie, une durée moins longue d’hospitalisation, une moindre mortalité hospitalière, au cours des trois ou quatre dernières semaines par rapport à ce qu’on a observé auparavant, pourraient indiquer que ce nouveau variant provoque une maladie moins sévère.

Cela dit, on sait qu’un variant moins pathogène mais beaucoup plus transmissible peut, mathématiquement, provoquer beaucoup d’hospitalisations et de décès. Il serait très imprudent, au vu d’informations préliminaires, fragmentaires et donc non validées, de miser sur une moindre virulence d’Omicron par rapport à Delta. Il importe donc de rester particulièrement vigilant et de respecter plus que jamais les gestes barrières, en particulier le port du masque, la distanciation physique et l’aération des espaces clos.

Par ailleurs, des données préliminaires en provenance d’Afrique du Sud semblent indiquer que la plupart des patients admis à l’hôpital ont moins de 40 ans, mais il convient d’être particulièrement prudent avant d’en conclure quoi que ce soit. En tout état de cause, un suivi rigoureux au cours des prochaines semaines permettra de préciser les manifestations cliniques liées à une infection à Omicron ainsi que d’évaluer le pronostic associé.

Des données préliminaires, provenant du ministère de la santé sud-africain et communiquées le 10 décembre, font état d’une efficacité vaccinale contre les formes sévères de Covid-19 due au variant Omicron de seulement 68,7 %*** chez les personnes doublement vaccinées avec le vaccin de Pfizer et de 92,4 %*** chez les individus vaccinés puis infectés. 

Qu’en est-il au Royaume–Uni ? Dans son rapport mis en ligne le 10 décembre, l’Agence britannique de sécurité sanitaire (UKHSA) indiquait « À ce jour, aucun cas d’infection par Omicron n’a été signalé comme ayant fait l’objet d’une hospitalisation ou d’un décès. Par conséquent, il n’est pas possible de comparer le risque d’hospitalisation ou de décès avec d’autres variants. Cependant, il faut noter que dans la plupart des cas le prélèvement a été réalisé très récemment et qu’il existe un décalage entre le début de l’infection et l’hospitalisation ou le décès ». Là encore, insistait l’UKHSA, il faudra attendre plusieurs semaines avant de connaître la proportion des formes graves liées à Omicron par rapport à celles associées à Delta durant la même période.

À peine deux jours plus tard, le 12 décembre, les responsables de santé (Chief Medical Officers) de l’Angleterre, de l’Écosse, du Pays de Galles et de l’Irlande du Nord ont indiqué dans un communiqué commun diffusé par le ministère de la santé que les données sur la gravité de la maladie seront certes plus claires au cours des prochaines semaines, mais que « des hospitalisations dues à Omicron ont déjà eu lieu et il est probable qu’elles augmentent rapidement ».

Les autorités britanniques misent sur le rappel pour éviter de submerger les hôpitaux. Le Premier ministre Boris Johnson, parlant d’ « un raz-de-marée d’Omicron qui arrive », a annoncé dimanche 12 décembre au soir une forte accélération de la campagne de rappel vaccinal, avec l’objectif de proposer une troisième dose de vaccin contre la Covid-19 à tous les plus de 18 ans en Angleterre. Ils pourront désormais en bénéficier avant le Nouvel An. Les autres nations du Royaume-Uni (Écosse, Irlande du Nord et Pays de Galles) vont également accélérer leur programme de vaccination.  

Il est possible qu’il ne faille pas attendre très longtemps avant que ces données de terrain concernant la sévérité associée à l’infection par Omicron soient disponibles dans d’autres pays européens. En effet, la diffusion d’Omicron ne cesse de progresser dans la zone Europe, déjà largement touchée par l’épidémie due au variant Delta. Selon l’ECDC, au 10 décembre, le variant Omicron avait été détecté dans 23 pays : Allemagne, Autriche, Belgique, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, France, Grèce, Islande, Irlande, Italie, Lettonie, Liechtenstein, Norvège, Pays-Bas, Portugal, République tchèque, Roumanie, Slovaquie, Suède. Les autorités sanitaires danoises ont commencé le 12 décembre à faire état de patients hospitalisés infectés par le variant Omicron (2 471 cas, 27 hospitalisations).

Et des épidémiologistes de craindre la survenue d’une nouvelle vague de très forte ampleur peu après la cinquième dont le pic semble proche. Autrement dit, de redouter une sixième vague due au variant Omicron en janvier en France.

Marc Gozlan (Suivez-moi sur Twitter, Facebook, LinkedIn)

* Le variant Omicron a émergé après les variants Alpha (ex-variant britannique B.1.1.7), Beta (ex-variant sud-africain B.1.351), Gamma (ex-variant brésilien P1) et Delta (ex-variant indien B.1.617.2). Les variants Zeta et Theta ont été rétrogradés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et ne sont plus des variants sous surveillance. Quant aux variants Kappa, Iota, Eta et Epsilon, leur menace a également été revue à la baisse par l’OMS. Ils sont aujourd’hui considérés comme des variants sous surveillance. Les variants Lambda (C.37) et Mu (B.1.621), respectivement détectés au Pérou et en Colombie, sont répertoriés comme variants d’intérêt.

** Avec un IC95% : 3,4-7,6.

*** Avec un IC95% : 32,1-90,0 %.

**** : Avec un IC95% : 71,5-98,2 %.

Pour en savoir plus :

SARS-CoV-2 variants of concern and variants under investigation in England Technical briefing 31. UK Health Security Agency. 10 December 2021

Risk assessment for SARS-CoV-2 variant: Omicron VOC-21NOV-01 (B.1.1.529). UK Health Security Agency. 9 December 2021.

Roessler A, Riepler L, Bante D, et al. SARS-CoV-2 B.1.1.529 variant (Omicron) evades neutralization by sera from vaccinated and convalescent individuals. medRxiv. Posted December 11, 2021. doi: 10.1101/2021.12.08.21267491  

Schmidt F, Muecksch F, Weisblum Y, et al. Plasma neutralization properties of the SARS-CoV-2 Omicron variant. [Preprint].

Kuhlmann C, Mayer CM, Claassen M, et al. Breakthrough Infections with SARS-CoV-2 Omicron Variant Despite Booster Dose of mRNA Vaccine. SSRN. [Preprint]. Posted: 10 Dec 2021. doi: 0.2139/ssrn.3981711

Wilhelm A, Widera M, Grikscheit K, et al. Reduced Neutralization of SARS-CoV-2 Omicron Variant by Vaccine Sera and Monoclonal Antibodies. medRxiv. Posted December 11, 2021. doi: 10.1101/2021.12.07.21267432 

Sheward DJ, Kim C, Pankow A. Quantification of the neutralization resistance of the Omicron Variant of Concern. [Preprint].

Cele S, Jackson L, Khan K, et al. SARS-CoV-2 Omicron has extensive but incomplete escape of Pfizer BNT162b2 elicited neutralization and requires ACE2 for infection. medRxiv. Posted December 09, 2021. doi: 10.1101/2021.12.08.21267417.

Andrews N, Stowe J, Kirsebom F, et al. Effectiveness of COVID-19 vaccines against the Omicron (B.1.1.529) variant of concern. [Preprint]. Posted 9 Dec 2021.

Cao Y, Wang J, Fanchong Jian F, et al. B.1.1.529 escapes the majority of SARS-CoV-2 neutralizing antibodies of diverse epitopes. bioRxiv. Posted December 9, 2021. doi: 10.1101/2021.12.07.470392

Sur le web :

UK coronavirus (COVID-19) alert level increased from Level 3 to Level 4. Department of Health and Social Care. Published 12 December 2021)

Evidence paper on rapid rise of Omicron cases. Scottish Government. Published: 10 Dec 2021

Epidemiological update: Omicron variant of concern (VOC) – data as of 10 December 2021 (12:00). ECDC. 10 Dec 2021.

Status of the SARS-CoV-2 variant Omicron in Denmark. Staten Serum Institut (10 Dec 2021)

Pfizer and BioNTech Provide Update on Omicron Variant (communiqué de presse Pfizer, 8 décembre 2021)

LIRE aussi : Variant Omicron : un risque d’échappement immunitaire

Covid-19 : ce qu’on sait et ce qu’on ignore sur le nouveau variant Omicron (B.1.1.529)

Covid-19 : le défi des nouveaux variants

california wed © Flickr

Depuis quelques jours, les données concernant les variants du coronavirus SARS-CoV-2, qu’ils soient britannique, sud-africain, brésilien, voire possiblement américain, se succèdent à un rythme soutenu. Ces informations sont publiées sur des sites de prépublication en attendant d’être évaluées par les pairs et faire l’objet d’une publication dans une revue scientifique. D’autres résultats sont postés en ligne sur des plateformes d’analyse et d’interprétation de données sur l’évolution moléculaire des virus et leur diffusion épidémique.

Ces nouveaux variants du SARS-CoV-2 inquiètent les autorités dans le monde entier. En effet, certains sont plus contagieux que les variants circulant actuellement, appelés variants historiques.

Commençons par un bref rappel sur l’apparition des variants viraux. De nombreuses mutations aléatoires se produisent dans le génome du SARS-CoV-2 lors des cycles de réplication virale. La plupart des variants, porteurs de mutations neutres ou non avantageuses pour le virus, disparaissent durant un processus de sélection naturelle, d’autres virions, porteurs de mutations leur conférant un avantage sélectif, peuvent diffuser dans la population infectée. Dans un environnement donné, ces derniers finissent parfois par constituer un nouveau variant. Celui-ci apparaît alors dans l’arbre phylogénétique, qui réunit l’ensemble des séquences de SARS-CoV-2 selon le degré de parenté génétique, sous la forme d’une nouvelle branche, ce que les généticiens moléculaires appellent un nouveau lignage (lignée virale).

La découverte du coronavirus SARS-CoV-2 qui sera appelé « variant anglais » remonte au 20 septembre 2020, dans le Kent (Sud-Est de l’Angleterre). Le 14 décembre, le Royaume-Uni signale à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) la circulation de ce variant. Baptisé dans un premier temps VUI 202012/01 (pour Variant Under Investigation, année 2020, mois 12, variant 01), il est rapidement renommé, le 18 décembre 2020, VOC 202012/01 (pour Variant Of Concern, littéralement « variant préoccupant »). Il fait partie du lignage B.1.1.7 dans l’arbre phylogénétique. Ces variants ne peuvent être formellement identifiés que par le séquençage de leur ARN qui compose leur matériel génétique.

Résultats PCR discordants

Ce variant anglais VOC 202012/01 comporte la délétion 69-70, encore désignée ΔH69/V70 car elle provoque la perte des acides aminés histidine en position 69 et valine en position 70. Cela a pour conséquence d’entraîner dans certains tests diagnostiques PCR (TaqPath RT-PCR, ThermoFischer) l’obtention de deux signaux au lieu de trois, autrement dit des résultats RT-PCR discordants. En effet, il y a alors perte d’un signal du fait qu’une des sondes utilisées ne se fixe plus sur sa séquence cible, perdue du fait de la délétion 69-70. Cela entraîne une négativation de la détection du gène S (S gene target failure ou SGTF) alors qu’il y a conservation des deux autres signaux. Ceci a rapidement été utilisé comme un moyen indirect de détection du variant VOC 202012/01 à des fins de surveillance, sachant que l’identification formelle de ce nouveau lignage passe nécessairement par le séquençage dans la mesure où cette délétion ΔH69/V70 peut se voir dans d’autres souches virales circulantes. Les chercheurs britanniques ont déterminé que 99,5 % des séquences génétiques renfermant la délétion 69-70 entraînaient une négativation de la détection du gène S (SGTF).

La proportion de la détection de souches porteuses de la délétion 69-70, marqueur du variant VOC 202012/01, a ainsi considérablement augmenté en Angleterre entre la mi-octobre et le mois de décembre, passant de 3 % le 12 octobre 2020 à 64 % le 2 novembre pour finalement atteindre 98 % le 7 décembre. Cette augmentation a gagné toutes les régions d’Angleterre au cours du mois de décembre.

Progression hebdomadaire de début septembre à fin décembre 2020 en Angleterre de la fréquence des isolats viraux SARS-CoV-2 entraînant une négativation de la détection du gène S (« S gene target failure », SGTF) aux tests diagnostiques TaqPath-PCR.

Entre le 20 septembre et le 4 janvier 2021, 68 246 prélèvements provenant de patients Covid-10 ont été séquencés. Ce variant anglais a notamment été détecté chez environ 6 % des enfants âgés de 0 à 9 ans, 14 % parmi les 10-19 ans, 17 % des jeunes adultes âgés de 20 à 29 ans, 19 % parmi les 30-39 ans, 18 % chez les 40-49 ans, 13 % des 50-59 ans, 6 % des 60-69 ans, 3 % des 70-79 ans et 2 % des plus de 80 ans. Selon les données disponibles, la distribution par âge et sexe de ce variant identifié en Angleterre serait similaire à celle des autres variants en circulation.

On compte aujourd’hui 51 pays dans lesquels le variant anglais a été détecté. Au total, 35 pays ont déposé les séquences du génome du variant B.1.1.7 dans la base de données européennes GISAID.

Nombre de séquences du variant anglais B.1.1.7 déposées par pays.

Outre le Royaume-Uni (13018 sur 13699 séquences déposées), ces pays qui ont transmis le plus grand nombre de séquences sont, par ordre décroissant, le Danemark, les États-Unis, le Portugal, les Pays-Bas, Israël, l’Irlande, l’Italie, l’Australie, la Norvège, l’Espagne, la Nouvelle-Zélande, la France, la Finlande, Singapour, la Suède, la Slovaquie, l’Allemagne, l’Inde, la Suisse, la Belgique, le Brésil, la Jamaïque, la Grèce, le  Luxembourg, Hong Kong, la Corée du Sud, le Pakistan, l’Équateur, le Canada, le Mexique, la Roumanie, le Sri-Lanka, Oman, le Liban. Au Danemark, le variant anglais B.1.1.7 représente actuellement 3,6 % des virus SARS-CoV-2 séquencés.

Carte des vols internationaux en provenance des principaux aéroports de Londres (Heathrow, Gatwick, Luton, City, Stansted, Southend) au mois d’octobre 2020. L’épaisseur des traits est fonction du nombre des vols en partance depuis Londres.

Publiée le 13 janvier sur le site virological.org, une équipe de recherche internationale, dirigée par Áine O’Toole (université d’Edimbourg) et Moritz Kraemer (université d’Oxford) a analysé les liaisons aériennes entre les principaux aéroports londoniens et chaque pays. Il ressort que 16 pays ayant reçu plus de 5 000 voyageurs en provenance de Londres ont rapporté la présence du variant anglais par le séquençage.

Cartographie mondiale de la transmission du variant anglais VOC 202012/01 (lignage B.1.1.7). Source : OMS

Un variant 40 % à 70 % plus transmissible

En septembre 2020, ce variant représentait en Angleterre un cas sur quatre des nouveaux cas de Covid-19, un taux qui deux mois et demi plus tard, à la mi-décembre, a atteint quasiment les deux-tiers des nouvelles infections par le SARS-CoV-2. Ce variant représenterait actuellement un quart des cas diagnostiqués en Écosse et en Irlande.

Premier nouveau variant à avoir émergé en décembre, le VOC 202012/01 semble être entre 40 % à 70 % plus transmissible. L’analyse des données du traçage de cas indique une transmissibilité plus élevée, avec un taux d’attaque secondaire (à partir d’un cas index porteur de ce variant) d’environ 11 % à 15 %.

Ce nouveau variant VOC 202012/01 renferme en particulier trois changements dans la séquence génétique codant la protéine spike (spicule) grâce à laquelle il s’arrime aux cellules qu’il infecte. Il appartient à un lignage, baptisé B.1.1.7, autrement dit à un même sous-groupe de virus apparentés génétiquement.

Ce variant renferme la mutation en position 501 dans la séquence des acides aminés de la protéine spike. Elle se situe au niveau d’un groupe de six acides aminés qui entre directement en contact avec le récepteur ACE2 qui sert de porte d’entrée du virus dans les cellules cibles. Cette mutation se situe dans le RBD (receptor binding domain) contenant le motif de fixation du virus au récepteur sur la cellule. Le nouveau variant renferme également une mutation sur le 69ème et 70ème acide aminé de la protéine spike (délétion 69-70).

Il a été montré que la mutation 501 semble entraîner une plus forte capacité de liaison du virus au récepteur cellulaire ACE2. De fait, ce variant VOC 202012/01 est de 40 % à 70 % plus transmissible que les autres souches virales en circulation, en moyenne 56 % plus contagieux.

Ce variant anglais, avec une capacité de transmission nettement plus élevée, ne paraît cependant pas plus pathogène que les variants historiques du SARS-CoV-2. En effet, on n’observe pas de différence des formes cliniques liées à ce variant en comparaison avec les autres virus circulants. « Il peut toucher les enfants sans entraîner plus de formes graves. On ne sait pas encore si les patients ayant déjà fait un COVID-19 sont totalement protégés contre une nouvelle infection avec ce variant », indique le Conseil scientifique dans son dernier avis du 13 janvier 2021.

Selon le Conseil scientifique, ce variant est déjà présent en France. « Même si la majorité des cas sont liés à des retours d’Angleterre, certains patients positifs n’ont pas de lien épidémiologique avec des sources venant du Royaume-Uni, et il est légitime de penser que le virus a déjà commencé à circuler à bas bruit », déclarent les experts.

Répartition en France métropolitaine des cas d’infection au variant anglais VOC 202012/01 par région, jusqu’au 13 janvier 2021.

Au 13 janvier 2021, 66 cas d’infection par le variant anglais VOC 202012/01 ont été recensés en France. Ces cas ont été identifiés chez des patients prélevés entre le 13 décembre 2020 et le 4 janvier 2021. Ce variant a été rapporté dans onze régions, aucun cas n’ayant été notifié en outre-mer. À partir de ce lundi 18 janvier, la Martinique impose un isolement de sept jours pour tous les voyageurs.

Une enquête « flash » a été effectuée sur deux jours, les 7 et 8 janvier 2021, afin d’évaluer le niveau de circulation du variant anglais en France. Réalisée sur un échantillon très large de RT-PCR effectués par 89 laboratoires répartis dans treize régions de France, elle a indiqué que, rapportée au total des tests RT-PCR positifs, la proportion de ceux qui étaient discordants (perte d’un signal sur les trois habituellement détectables) était de 3,8 %. Sachant que l’on estime qu’un séquençage est réalisé dans 38 % des cas résultats discordants, Santé publique France estime qu’ « il est possible d’estimer que le variant VOC 202012/01 serait responsable de 1 à 2 % des cas de Covid-19 actuellement diagnostiqués en France ».

Selon le Conseil scientifique, le variant anglais devrait rapidement se développer dans les semaines à venir. Des analyses de modélisation indiquent, que sous l’hypothèse que le taux de transmission de ce variant est de 40 % à 70% plus élevé que celui des autres variants et que le nombre de cas dus aux autres variants restera stable dans les semaines à venir (de l’ordre de 20 000 cas quotidiens), on peut s’attendre à ce qu’il y ait entre 580 et 2 610 cas liés au variant anglais par jour le 1er février et entre 2 800 et 26 390 le 1er mars. En d’autres termes, le variant anglais serait à l’origine de 2 % à 12% de l’ensemble des cas de Covid-19 détectés le 1er février et entre 12 % et 64 % le 1er mars.

En tout état de cause, il importe de renouveler les enquêtes « flash » de surveillance du VOC 202012/01, mais également d’être en mesure de détecter ce variant anglais en routine par de nouveaux tests RT-PCR spécifiques pour réaliser aussi rapidement que possible un traçage des cas.

Enfin, souligne le Conseil scientifique, les mesures barrières, efficaces contre  les variants historiques, le sont également vis-à-vis du variant anglais. Elles doivent être maintenues, notamment dans les lieux collectifs (dont les lieux de culte), pour se protéger d’un virus encore plus contagieux.

Inquiétude au Japon

Le 9 janvier 2021, le Japon a notifié à l’OMS un nouveau variant dérivé du lignage brésilien B.1.1.28. L’Institut national des maladies infectieuses (NIID) a posté le 11 janvier un bref rapport, traduit le lendemain en anglais, sur ce nouveau variant identifié chez quatre voyageurs venus du Brésil. Le NIDD a détecté ce nouveau variant chez quatre personnes ayant débarqué quatre jours plus tôt à Tokyo en provenance de l’État d’Amazonas (nord-ouest du Brésil).

Ces voyageurs avaient subi un dépistage à l’aéroport de Haneda à Tokyo, le Japon effectuant un dépistage systématique des personnes arrivant de l’étranger. Il s’avère que l’isolat viral détecté chez ces quatre voyageurs, deux adultes et deux enfants, renferme des mutations déjà décrites dans les variants récemment découverts au Royaume-Uni et en Afrique du Sud. Les quatre passagers ont été placés en quarantaine dans un hôtel de l’aéroport. L’homme quadragénaire, présentant des difficultés respiratoires, a été hospitalisé. La femme, âgée d’une trentaine d’années, souffre de maux de tête et de gorge. Parmi les enfants, le garçon présente de la fièvre tandis que la fille est, elle, asymptomatique.

Le nouveau variant japonais qui dérive d’un lignage présent au Brésil (B.1.1.28) renferme un nombre très élevé de changements génétiques. Il comporte douze mutations d’acides aminés dans la protéine spike, notamment les mutations N501Y, E484K, K417T.

Les autorités sanitaires japonaises précisent que les quatre voyageurs en provenance d’Amazonas ne sont pas porteurs d’un nouveau variant récemment isolé dans cet état du nord du Brésil et appelé P1. Des chercheurs brésiliens ont en effet détecté en décembre 2020 la circulation de ce nouveau variant à Manaus dans l’État d’Amazonas [1].

Nouveau variant P.1 à Manaus, État d’Amazonas

En octobre 2020, l’État d’Amazonas avait été durement touché par l’épidémie de Covid-19. Publiée dans la revue Science, une récente étude indiquait que plus des trois quarts (76 %) des habitants de Manaus, la plus grande cité de la région amazonienne, possédaient des anticorps contre le SARS-CoV-2. C’est dans cet État qu’un nouveau variant, appelé P.1, a été découvert en décembre 2020. Or il se trouve que Manaus a connu une augmentation rapide des cas d’infection par le SARS-CoV-2 et des hospitalisations à la mi-décembre 2020.

Ce nouveau variant a été détecté par les tests RT-PCR dans 13 prélèvements sur 31 collectés entre les 15 et 23 décembre 2020. Il était en revanche absent dans 26 échantillons biologiques recueillis entre mars et novembre 2020 et séquencés. Nuno R. Faria et ses collègues de l’Imperial College de Londres, en association avec des chercheurs des universités d’Oxford et de São Paulo, ont rapporté le 12 janvier les caractéristiques génomiques de ce nouveau variant P.1 sur le site virological.com.

P.1 est un descendant du lignage B.1.1.28 (qui circule abondamment dans l’État de Rio de Janeiro et qui a probablement émergé au Brésil en février 2020). Ce variant P.1 est porteur d’une signature génétique très particulière, véritable constellation de mutations. Il renferme notamment dix-sept changements uniques en acides aminés, trois délétions (perte de matériel génétique) et une insertion, c’est-à-dire un ajout de nucléotides (« lettres ») par rapport aux séquences des isolats viraux les plus proches sur le plan génétique. Ce nouveau variant brésilien renferme en particulier les mutations E484K, K417T et N501Y.

La mutation E484K pourrait être associée à un échappement immunitaire, à savoir à une moindre capacité de neutralisation par les anticorps lors de l’infection naturelle ou celle induite par la vaccination. Elle a en effet été observée dans des isolats viraux échappant à l’activité neutralisante du sérum de patients Covid-19 convalescents. Dans certains cas, le pouvoir neutralisant des anticorps était réduit de plus de dix fois. On peut noter à ce propos qu’un virus porteur de la mutation E484K a récemment été identifié au Brésil dans deux cas de réinfection chez des patients ayant déjà présenté une infection par un virus d’une autre lignée (B.1.1.33).

Le variant brésilien P.1 renferme la mutation N501Y sur la protéine spike, comme le variant anglais et celui sud-africain. Il contient également une délétion (dans la région ORF1b). Par ailleurs, P.1 partage avec le variant sud-africain trois mutations sur la protéine spike (K417N/T, E484K, N501Y), de même qu’une délétion dans ORF1b.

La découverte du nouveau variant P.1 repose sur un petit nombre de séquences analysées (37 au total). Il convient donc de procéder à un séquençage plus important dans cette région du nord du Brésil pour évaluer plus précisément la fréquence de ce nouveau variant au fil du temps, estimer au mieux le moment de son émergence et surveiller sa diffusion. P.1 est donc à surveiller comme le variant anglais, d’autant que ce dernier a été identifié dans la région début décembre 2020, à peine dix jours après avoir été détecté au Royaume-Uni.

Selon une autre équipe brésilienne, les patients japonais de retour de la région amazonienne pourraient avoir été infectés par un virus appartenant à un lignage qui circule dans l’État d’Amazonas depuis avril 2020 et au sein duquel un nouveau variant aurait récemment émergé. En effet, ces chercheurs font remarquer que les lignages amazoniens B.1.1.28 ont évolué à un rythme constant entre avril et novembre 2020 et qu’aucune des séquences ne présentait jusqu’à présent un nombre anormalement élevé de mutations dans la protéine spike ou dans d’autres régions du génome viral. Selon Felipe Naveca de l’Instituto Leônidas e Maria Deane (Manaus), il est probable que ce virus correspond à un variant dont l’émergence se situe entre décembre 2020 et janvier 2021. Afin d’en savoir plus, les chercheurs brésiliens vont entreprendre une surveillance génomique parmi les individus nouvellement infectés dans l’État d’Amazonas.

Les équipes s’accordent à penser que le jeu de mutations/délétions partagé par les nouveaux variants identifiés au Brésil, au Royaume-Uni et en Afrique du Sud, semble indiquer qu’ils ont sans doute émergé de façon complètement indépendante. Selon les chercheurs, l’émergence simultanée au cours du second semestre 2020, dans ces pays distants les uns des autres, de différents lignages porteurs des mutations K417N, E484K et N501Y dans la RBD de la protéine spike tient au fait qu’une pression de sélection similaire chez des millions de personnes infectées a abouti à des changements convergents dans le génome du SRAS-CoV-2.

Pour le dire autrement, ces mutations sont apparues de façon indépendante mais à la faveur de phénomènes liés à une adaptation du SARS-CoV-2, favorisée par le fait que le virus circule chez des millions de personnes. « Si ces mutations devaient conférer un avantage sélectif en termes de transmissibilité virale, on peut s’attendre à une augmentation de la fréquence de ces lignages viraux au Brésil et dans le monde entier au cours des prochains mois », déclarent Felipe Naveca et ses collègues.

Le 14 janvier 2021, Public Health England a annoncé que huit cas d’infection au variant brésilien VUI 202101/01 (lignage B.1.1.7) ont été confirmés au Royaume-Uni.

Depuis le 15 janvier 2021, le Royaume-Uni a décidé d’interrompre ses liaisons avec plusieurs pays d’Amérique du Sud ainsi que des pays ayant des liens étroits avec le Brésil. Ainsi, les passagers ayant séjourné au cours des dix derniers jours par l’Argentine, le Brésil, la Bolivie, le Chili, le Cap-Vert, la Colombie, l’Équateur, la Guyane française, le Guyana, le Paraguay, le Panama, le Portugal (y compris Madère et les Açores), le Pérou, le Suriname, l’Uruguay et le Venezuela, ne pourront plus se rendre au Royaume-Uni. Même chose pour les voyageurs qui y ont transité. Par ailleurs, les ressortissants britanniques et irlandais ayant voyagé dans ces pays devront s’isoler pendant dix jours, tout comme les membres de leur foyer familial. La décision d’imposer ces restrictions a été prise afin d’empêcher la propagation du variant P.1 identifié à Manaus. À ce jour, aucun cas d’infection au variant P.1 n’a cependant été détecté au Royaume-Uni.

Cartographie mondiale de la transmission du variant sud-africain 501Y.V2 (lignage B.1.351). Source : OMS

Variant sud-africain

Parallèlement à l’émergence des variants anglais et brésiliens, un nouveau variant SARS-CoV-2, baptisé 501Y.V2 (lignage B.1.351), a été détecté en Afrique du Sud le 18 décembre 2020. Lui aussi renferme une constellation de mutations dont trois, K417N, E484K et N501Y, sont localisées dans le domaine RBD de la protéine spike, le domaine de fixation au récepteur.

Ce variant sud-africain a été détecté à partir de 190 échantillons collectés entre le 15 octobre et le 25 novembre 2020 dans les provinces du KwaZulu-Natal, Cap Oriental et Cap Occidental. À la mi-octobre, la baie Nelson Mandela (Cap Oriental) avait connu une flambée épidémique. L’épidémie de Covid-19 avait rapidement diffusé dans les régions voisines en octobre et en novembre, pour ensuite atteindre les provinces du Cap Occidental et du KwaZulu-Natal.

Les analyses phylogénétiques semblent indiquer que ce nouveau variant 501Y.V2 a émergé début juillet-fin août 2020 dans la métropole de la baie Nelson Mandela (qui comporte notamment la ville de Port Elizabeth). Au début novembre, ce variant est devenu majoritaire, supplantant les trois lignages qui avaient circulé lors de la première vague épidémique et s’imposant comme le lignage dominant dans les provinces du Cap Oriental et Cap Occidental, avec dans le même temps une résurgence importante du nombre de cas. Les données génomiques et épidémiologiques plaident en faveur d’une plus grande transmissibilité de ce nouveau lignage, dont il partage avec le variant anglais la mutation N501. Par ailleurs, il a été montré que la mutation E484K confère une résistance aux anticorps neutralisants, ce qui fait qu’elle est inquiétante d’un point de vue de l’échappement immunitaire.

Une hypothèse formulée pour expliquer l’apparition de ce nouveau variant sud-africain porteur d’un grand nombre de mutations, alors même que le taux de mutations est habituellement faible chez le virus (une à deux mutations par mois), serait qu’il aurait pu émerger chez des individus infectés de façon prolongée. La mutation 501Y a d’ailleurs été détectée chez un individu américain immunodéprimé et présentant de ce fait une infection virale prolongée. Cette hypothèse est renforcée par le fait que l’on compte de nombreux individus infectés par le VIH en Afrique du Sud. Il semble cependant que la diversité génétique observée dans ce nouveau lignage ne puisse être expliquée par la présence prolongée du virus chez un seul individu VIH+. Selon Houriiyah Tegally et ses collègues de l’université du KwaZulu-Natal (Durban), il semble plus probable que l’accumulation d’une constellation de mutations dans ce nouveau lignage soit la résultante du passage du virus au sein d’une chaîne de transmission impliquant de nombreux individus, sans même qu’il soit nécessaire que ceux-ci soient immunodéprimés.

Utilisant les données épidémiologiques disponibles, des chercheurs britanniques spécialisés dans la modélisation mathématique de la London School of Hygiene & Tropical Medicine ont estimé les conséquences du variant 501Y.V2 sud-africain en termes de transmissibilité et d’échappement immunitaire. Selon Carl Pearson et ses collègues, ce variant sud-africain serait 50 % plus transmissible que les souches virales antérieurement circulantes.

Selon ces chercheurs, « L’émergence de deux nouveaux variants au Royaume-Uni et en Afrique du Sud, présentant de manière similaire une transmissibilité accrue, suggère que la maîtrise mondiale du SARS-CoV-2 au début de 2021 posera des défis importants. Cela souligne la nécessité de maintenir les mesures barrière et d’accélérer le déploiement de la vaccination, ainsi que de continuer à surveiller l’efficacité des vaccins contre les nouveaux variants afin de détecter rapidement tout échappement immunitaire ».

Selon l’OMS, le variant 501Y.V2, plus contagieux, ne provoquerait pas de formes plus sévères.

Au 12 janvier 2021, vingt pays ont rapporté des cas confirmés de Covid-19 dus au variant 501Y.V2. Le Japon a signalé des cas confirmés tandis que la Chine vérifie quelques cas suspects. En Afrique, des cas suspects, rapportés au Botswana et en Zambie, sont en cours d’analyse.

Au 13 janvier 2021, trois cas d’infection au variant 501Y.V2 ont été confirmés en France métropolitaine, en l’occurrence dans deux régions (Grand-Est et Provence-Alpes-Côte d’Azur), a indiqué Santé publique France. Le 14 janvier, on a appris qu’un cas grave de ce variant a été observé en Ile-de-France et un autre à Nantes sur des patients revenus du Mozambique. Santé publique France note cependant dans son point hebdomadaire du 14 janvier que les cas de Covid-19 confirmés en provenance d’Afrique du Sud « n’ont pas tous fait l’objet d’une demande de séquençage pour identification du variant », ajoutant que des précisions seront apportées ultérieurement.

Vendredi 15 janvier, un cas d’infection au variant 501Y.V2 a été détecté à Mayotte chez un patient ayant voyagé aux Comores. Les autorités locales ont décidé de suspendre les liaisons maritimes et aériennes internationales, pour 15 jours à partir de dimanche. Ce variant sud-africain pourrait en effet fortement diffuser à la Réunion et aux Comores.

Par ailleurs, le Conseil scientifique souligne que si la détection à large échelle du variant anglais n’a été possible que grâce un test RT-PCR de criblage donnant des résultats discordants, on ne dispose pas actuellement d’outils de criblage comparables pour le variant sud-africain 501Y.V2, voire pour d’éventuels autres variants. Les experts estiment donc « urgent de mettre en place une surveillance qui permette de suivre sa progression », mais également capable de détecter et suivre l’émergence d’autres variants potentiels. Ils estiment donc « essentiel » que des tests RT-PCR diagnostiques spécifiques soient rapidement mis en place dans ces deux départements d’outre-mer (Réunion, Mayotte), parallèlement à une stratégie « Tester-Tracer-Isoler » qui soit particulièrement active.

Le Conseil scientifique recommande des restrictions strictes aux frontières avec l’Afrique du Sud, avec limitation des vols, de même que des interventions similaires (tests et isolement) à celles préconisées au sujet du variant anglais pour les personnes en provenance du Royaume-Uni ou d’Irlande.

Au Royaume-Uni, au 14 janvier 2021, 35 cas confirmés et 12 cas probables sur le plan génomique d’infection au variant 501Y.V2 ont été détectés. Outre les restrictions imposées le 23 décembre 2020 sur les voyageurs en provenance d’Afrique du Sud, le ministère des transports britanniques a annoncé de nouvelles restrictions aux passagers venant de neuf pays du sud de l’Afrique : Namibie, Zimbabwe, Botswana, Swaziland, Zambie, Malawi, Lesotho, Mozambique, Angola, mais également de l’Ile Maurice et des Seychelles qui entretiennent d’importantes relations avec l’Afrique du Sud.

Le 16 janvier 2021, l’Autorité danoise de contrôle des maladies infectieuses (Statens Serum Institute, SSI) a annoncé avoir détecté un cas du variant sud-africain sur l’île de Seeland, associé à un voyage à Dubaï.

Variants américains

Aux États-Unis, la situation a également évolué ces derniers mois avec l’apparition de plusieurs nouveaux variants, également porteurs de multiples changements sur la protéine spike. Des chercheurs de l’université d’État de l’Ohio (Columbus) rapportent dans un article posté le 15 janvier 2021 sur le site de prépublication bioRxiv avoir détecté l’émergence, décembre 2020, de deux nouveaux variants. On rappelle que le virion SARS-CoV-2 comporte de l’intérieur vers l’extérieur : le génome constitué d’une molécule d’ARN, entouré d’une nucléocapside formée de protéine N, une matrice formée de protéine M puis une enveloppe lipidique dans laquelle sont enchâssées les nombreuses protéines spike (spicule).

Dans l’Ohio, Huolin Tu, Dan Jones et leurs collègues rapportent avoir détecté un variant très présent dans les prélèvements nasopharyngés au cours des mois de décembre 2020 et janvier 2021. Celui-ci renferme trois mutations, une sur la protéine spike, une deuxième sur la protéine M et une troisième sur la protéine N.

Un second variant a été détecté fin décembre 2020. Celui-ci partage deux mutations avec le variant anglais, en l’occurrence la mutation N501Y et une autre dénommée ORF8 R521, située dans ORF8, une région du génome viral codant une protéine accessoire, non structurale. Ce variant ne renferme pas d’autres changements présents dans la variante britannique et se distingue également du variant sud-africain (N501Y.V2). Les chercheurs font remarquer que ce second variant dérive d’un lignage qui circulait en Ohio avant décembre 2020. L’acquisition dans l’Ohio de la mutation N501Y s’est donc produite de manière indépendante de celle intervenue ailleurs dans le monde, notamment au Royaume-Uni et en Afrique du Sud.

Deux jours plus tôt, le 15 janvier, une autre équipe américaine, basée à la Southern Illinois University (Carbondale), a indiqué sur bioRxiv avoir identifié un nouveau variant aux États-Unis, non encore détecté dans d’autres pays. Fin mai 2020, il a rapidement acquis cinq mutations (non-synonymes) ayant abouti au remplacement d’un acide aminé par un autre. Ces mutations portent sur des protéines impliquées dans la réplication virale, le métabolisme et la sortie de la cellule. À celles-ci se sont ajoutées, à la mi-août, deux nouvelles mutations, dont Q677H située au sein de la protéine spike à proximité immédiate du site de clivage de la furine qui joue un rôle essentiel lors du processus d’entrée du virus dans les cellules.

Adrian Peter, Keith Gagnon et ses collègues estiment que ce nouveau variant est déjà prédominant aux États-Unis et qu’il composait la majorité des cas dans le pays à la fin 2020. Selon les chercheurs, l’augmentation de la prévalence de ce variant « hautement spécifique » du territoire continental américain, qui a débuté fin juin-début juillet, coïncide avec le début de la seconde vague de Covid-19 aux États-Unis. Les éventuelles conséquences des mutations hébergées par ce nouveau variant en termes de capacité de réplication, de transmissibilité, voire de virulence, restent encore à être évaluées.

Ce 17 janvier, le département de la santé publique de Californie a annoncé qu’un variant du SARS-CoV-2 avait été identifié dans plusieurs comtés à travers l’État, dont celui de Santa Clara. Ce variant compte trois mutations, dont la mutation L425R située dans le RBD de la protéine spike et qui a été associée à une résistance de certains anticorps neutralisants. Il a été détecté au Danemark en mars et est apparu en Californie en mai. Le séquençage de cette variante californienne a été réalisé en décembre 2020. Ce variant représenterait alors 3,8 % des génomes séquencés contre plus de 25 % en janvier 2021.

Mais tout cela est sans compter avec le nouveau variant anglais (VOC 202012/01, lignage B.1.1.7) qui a déjà fait son apparition aux États-Unis. Le 13 janvier 2021, on dénombrait environ 76 cas liés à la variante britannique dans dix États. En revanche, à ce jour, on ne dénombre sur le territoire américain aucun cas de Covid-19 associé au variant sud-africain ou brésilien.

Aux États-Unis, on estime que le VOC 202012/01 représente actuellement moins de 0,5 % des l’ensemble des souches SARS-CoV-2 circulantes au vu des résultats PCR discordants (données SGTF).

Dans leur bulletin épidémiologique hebdomadaire daté du 15 janvier, les Centres de contrôle et prévention des maladies (CDC) rapportent les résultats d’une modélisation. Celle-ci fait l’hypothèse que la prévalence initiale du variant anglais est de 0,5 % et que l’incidence quotidienne est de 60 cas pour 100 000 personnes au 1er janvier 2021 et que le rythme de vaccination est d’un million de doses administrées par jour à compter du 1er janvier 2021. Il envisage également que le taux de reproduction  (Rt ou R  effectif) se situe à 0,9 (épidémie décroissante) ou à 1,1 (épidémie en progression).

États-Unis. Simulation de l’évolution de l’incidence des variants SARS-CoV-2 actuels et du variant anglais (VOC 202012/01, lignage B.1.1.7) en supposant le déploiement de la vaccination et selon que le taux de reproduction effectif soit égal à1,1 ou 0,9 pour les variants actuels. Galloway SE, et al. MMWR Morb Mortal Wkly Rep. ePub: 15 January 2021.

Dans ce modèle, dans lequel la prévalence du variant anglais est initialement faible mais a une plus grande transmissibilité par rapport aux autres virus circulants, il apparaît que VOC 202012/01 deviendra le variant dominant aux États-Unis en mars prochain. Par ailleurs, que l’épidémie progresse ou décline, ce variant prendra de toute façon le pas sur les autres, soulignent Summer Galloway et ses collègues de la Covid-19 Response Team des CDC.

En conséquence, selon eux, des efforts devraient d’emblée être entrepris pour limiter la diffusion du variant VOC 202012/01 par tous les moyens universels (limitation des déplacements, couvre-feu, confinement) et une adhésion renforcée aux gestes barrières, ce qui permettrait de gagner du temps sur le déploiement en cours de la vaccination visant à atteindre une immunité collective.

Et les experts des CDC de rappeler l’évidence : quand bien même les variants SARS-CoV-2 ne seraient pas responsables de formes plus sévères de la Covid-19, il n’en reste pas moins que du fait de leur transmissibilité plus élevée, ils provoqueront un plus grand nombre de cas et que cela conduira inévitablement à un nombre plus important de personnes admises en réanimation, à un engorgement des capacités des système de soins déjà sous tension, et à un plus grand nombre de décès.

D’où l’importance, soulignent les épidémiologistes des CDC, de lutter contre la plus grande transmissibilité de ce variant par une « adhésion encore plus rigoureuse » aux gestes barrières (notamment la distanciation physique, le port du masque, l’hygiène des mains, de même que l’isolement et la mise en quarantaine), et ce conjointement à la vaccination. « Une transmissibilité accrue signifie également que la vaccination doit se faire à un rythme plus soutenu que celui prévu afin d’atteindre, pour protéger la population, le même niveau de contrôle de la maladie qu’avec des variants moins transmissibles », insistent les chercheurs des CDC.

Ils en profitent pour souligner le rôle essentiel d’une surveillance génomique renforcée, autrement dit du séquençage du génome viral. En effet, seul le séquençage peut renseigner sur la présence et l’émergence de nouveaux variants viraux. Aux États-Unis, le nombre des séquences déposées sur la base données génomiques GISAID représente moins de 0,3 % du nombre total des cas de Covid-19 (contre près de 5 % au Royaume-Uni et 12 % au Danemark).

Course contre la montre

Les experts des CDC américains ne sont pas les seuls à avoir effectué une étude de modélisation. Réalisant qu’une « course contre la montre » s’est engagée entre le déploiement de la vaccination et la pénétration du variant britannique dans la population française, le Conseil scientifique indique qu’une équipe de l’institut Pasteur de Paris a, elle aussi, cherché à évaluer la trajectoire possible du variant britannique en tenant compte du fait que ce dernier est 40 % à 70 % plus transmissible que les variants historiques.

Dans un scénario « optimiste » dans lequel la circulation des variants historiques reste stable dans les semaines et mois qui viennent, le groupe dirigé par Simon Cauchemez a simulé l’évolution du nombre de cas Covid-19 liés au variant anglais. Il ressort que le nombre de cas liés au variant anglais attendus le 1er mars, selon que le taux de transmission augmente de 40 %, 50 % ou 70 %, serait respectivement d’environ 3 700 cas, 7 300 cas, 26 300 cas. Et les chercheurs d’ajouter que ces dynamiques de croissance (qui ne sont pas des prédictions, insistent-ils) pourraient s’avérer différentes selon les mesures de contrôle qui seront mises en place.

Le groupe de Vittoria Colizza (Institut Pierre-Louis Épidémiologie et Santé Publique, Paris) a rapporté le 16 janvier 2021 des résultats indiquant que le variant anglais VOC-202012/01 deviendrait dominant en France entre fin février et mi-mars. Selon les chercheurs, « les nouvelles hospitalisations hebdomadaires devraient atteindre le niveau du pic de la première vague (environ 25 000 hospitalisations) entre mi-février et début avril, en l’absence d’interventions. Ces résultats montrent la nécessité de renforcer les mesures de distanciation sociale et d’accélérer la campagne de vaccination pour faire face à la menace du variant VOC-202012/01 ».

Une chose est sûre pour le Conseil scientifique, dont les conclusions rejoignent celles formulées par les épidémiologistes des CDC américains, « l’enjeu majeur des semaines qui viennent est de vacciner le maximum de personnes à risque » (…) avant une diffusion du variant anglais.

Dans un contexte où le nombre de cas du variant anglais reste relativement faible sur le territoire français, les experts jugent que l’on peut espérer ralentir sa diffusion. Aussi, le Conseil scientifique recommande-t-il « des mesures aux frontières permettant de réduire le risque d’introduction du virus en provenance du Royaume-Uni ou d’Irlande ». Ceci pourrait se faire, ajoute-t-il, par une extrême limitation des voyages et des transferts de Français vers ces pays, accompagnée par une pratique très stricte des tests et un isolement contrôlé au retour en France par les autorités, ou par des mesures de fermeture de frontières. Ces mesures de restrictions au niveau des voyages et des frontières permettraient de réduire l’apport de nouveaux cas extérieurs. « Cela nous laisserait davantage de temps pour vacciner un plus grand nombre de personnes fragiles », souligne le Conseil scientifique.

Importance du séquençage

De fait, l’émergence de nouveaux variants de SARS-CoV-2 dans le monde souligne l’importance d’augmenter les capacités de séquençage systématique partout où cela est possible mais également de mettre en commun la totalité des génomes viraux séquencés. Or, force est de constater que la base de données GISAID (qui compte à ce jour près de 360 000 séquences du SARS-CoV-2) ne compte que peu de séquences provenant de l’ensemble des 140 pays qui y contribuent. Le Royaume-Uni et le Danemark font figure d’exception dans la mesure où les séquences génomiques déposées par ces deux pays représentent respectivement 48 % et 7 % de l’ensemble. Les séquences « françaises » ne représentent que 0,9 % de l’ensemble des séquences génomiques de SARS-CoV-2 sur GISAID.

Dans son bulletin épidémiologique hebdomadaire, l’Organisation mondiale de la santé recommande qu’un séquençage systématique soit envisagé pour une fraction des voyageurs entrant dans un pays et que des prélèvements soient effectués dans la population générale afin de vérifier l’existence et l’étendue de la transmission locale des virus. En effet, selon l’OMS, « l’étendue géographique des deux variants anglais VOC 202012/01 et sud-africain 501Y.V2 est probablement sous-estimée dans la mesure où celle-ci dépend des possibilités de séquençage des pays et territoires ou zones ainsi que de la capacité de leurs systèmes de surveillance (sur le plan des tests diagnostiques PCR) à détecter ces nouveaux variants ».

On le voit, le séquençage génomique et l’épidémiologie génomique, qui permettent respectivement de détecter de nouveaux variants et de suivre leur propagation, s’imposent donc comme des outils indispensables d’aide à la décision en matière de santé publique par les autorités sanitaires des pays concernés.

Jeudi 14 janvier, avec deux semaines d’avance, le comité d’urgence de l’OMS s’est réuni pour discuter des nouveaux variants et de l’évolution de la pandémie. Ce comité d’experts a été présidé par le français Didier Houssin. Le comité a appelé à accroître les capacités en matière de tests diagnostiques PCR et de séquençage génétique du SARS-CoV-2, ainsi qu’à encourager le partage rapide des séquences et des métadonnées afin de renforcer la surveillance de l’évolution du virus, améliorer la compréhension des variants et leurs effets sur l’efficacité des vaccins, les traitements et les diagnostics.

Caractéristiques génétiques des variants préoccupants SARS-CoV-2 dans le monde (Septembre 2020- janvier 2021). Galloway SE, et al. MMWR Morb Mortal Wkly Rep. ePub: 15 January 2021.

Nécessité d’une nomenclature normalisée

Le comité d’urgence de l’OMS a également incité la communauté scientifique internationale à élaborer des définitions et une nomenclature normalisées des nouveaux variants, basées sur leur séquence génétique, en évitant donc une stigmatisation du fait de leur origine géographique respective [2].

Les experts appellent enfin à poursuivre et harmoniser les recherches pour répondre aux questions cruciales qui se posent concernant des mutations spécifiques et certains variants. De nombreuses inconnues demeurent sur l’impact biologique de certaines mutations en termes d’infectiosité, de contagiosité, de virulence et d’échappement à la réponse immunitaire naturelle ou post-vaccinale.

Développer de nouveaux outils RT-PCR

Le Conseil scientifique souligne la nécessité de développer des tests RT-PCR multiplex, capables de détecter simultanément plusieurs cibles sur le génome viral, en vue d’établir en routine le diagnostic des variants préoccupants actuels mais également de surveiller parallèlement l’émergence d’autres variants potentiels.

Deux équipes américaines ont commencé à s’atteler à cette tâche [3]. Les laboratoires de Nathan Grubaugh de l’École de santé publique de Yale (New Haven, Connecticut) et de Michael Worobey de l’université de l’Arizona (Tucson) travaillent actuellement à une stratégie de dépistage RT-PCR visant à distinguer la délétion Δ69/70 du variant anglais (B.1.1.7 ou VOC 202012/01) de celle du variant sud-africain (B.1.351 ou 501Y.V2).

Quid de l’efficacité des vaccins ?

Une étude, dirigée par des chercheurs de Pfizer (Pearl River, New York) et des chercheurs de l’University Texas Medical Branch (Galveston, Texas), indique que vingt sujets ayant été vaccinés lors des essais cliniques avec le vaccin à ARN messager BNT162b2 ont développé des anticorps sériques capables de neutraliser une souche virale renfermant la mutation N501. Celle-ci a été artificiellement introduite dans une souche SARS-CoV-2 dite de référence (USA-WA1/2020), dont la séquence génétique code la protéine spike correspondant au vaccin Pfizer.

Parue le 7 janvier 2021 sur le site bioXriv, cette étude ne porte donc que sur la seule mutation N501Y. Comme le soulignent Kuping Xie, Philip Dormizer et Pei-Yong Shi, le virus mutant Y501 créé pour évaluer l’efficacité du vaccin « n’inclut pas toute la série de mutations trouvées dans les souches qui circulent rapidement au Royaume-Uni ou en Afrique du Sud ». Néanmoins, la neutralisation préservée du virus Y501 est cohérente avec celle observée avec un panel de quinze virus (pseudovirus) artificiellement porteurs d’autres mutations trouvées dans les souches SARS-CoV-2.

L’évolution actuelle du SARS-CoV-2 impose néanmoins une surveillance continue, soulignent les auteurs de l’article qui indiquent que le laboratoire Pfizer se prépare à « l’éventualité qu’une future mutation pourrait nécessiter un changement de souche vaccinale ». Et les chercheurs de conclure qu’« une telle mise à jour serait facilitée par la flexibilité que permet la technologie des vaccins à ARN messager ».

Concernant l’efficacité des vaccins à ARN messager sur le variant sud-africain (qui en plus de contenir la mutation N501 renferme également la mutation E484K susceptible d’entrainer un échappement à la réponse immunitaire), le Conseil scientifique déclare que celle-ci « n’est pas complètement démontrée » [4], ajoutant qu’ « une approche originale pourrait être de privilégier une stratégie vaccinale régionale pour évaluer in vivo l’efficacité des vaccins actuels sur ce variant sud-africain ». Autrement dit, s’assurer de l’efficacité du vaccin sur le terrain en Afrique du Sud.

Réduire au maximum la circulation virale

Ces deux  derniers mois ont été marqués par l’identification de nouveaux variants, principalement au Royaume-Uni, en Afrique du Sud et au Brésil. Cela a conduit des gouvernements à imposer de nouvelles restrictions. Il est probable que la liste ne fera que s’allonger dans les mois qui viennent, tant la circulation du virus se maintient à un niveau élevé. Plus la diffusion est importante et plus cela laisse au virus des occasions de s’adapter et évoluer par l’acquisition de mutations. En d’autres termes, l’évolution naturelle de la pandémie de Covid-19 va conduire à l’émergence de nouveaux variants dont certains pourraient être plus contagieux, voire capables d’échappement immunitaire. Une course contre la montre est donc d’ores et déjà engagée.

La dynamique de la circulation du variant anglais sera observée à la loupe dans les jours qui viennent en France. Devant la situation actuelle jugée « préoccupante », le Conseil scientifique préconise deux mesures possibles : un confinement dans les régions ou les métropoles à risque, ou encore un confinement aménagé.

En France, comme ailleurs dans le monde, la lutte contre l’émergence et la propagation de nouveaux variants devrait donc passer par un impératif : réduire rapidement et au maximum la circulation virale. Faute de quoi, l’année 2021 pourrait bien être celle de tous les variants.

Marc Gozlan (Suivez-moi sur Twitter, sur Facebook, Linkedin)

[1] La présence des variants anglais et sud-africain a également été détectée au Japon chez des voyageurs, ce qui a conduit ce pays à fermer ses frontières avec le Royaume-Uni et l’Afrique du Sud. Le 10 janvier, on comptait trente personnes infectées par ces deux variants, dont trois contaminées dans le pays.

[2] Exemples : le variant sud-africain 501Y.V2, également appelé B.1.351, est dénommé VOC 202012/02 au Royaume-Uni. Le second variant brésilien, P.1 identifié à Manaus (État d’Amazontas) et détecté chez des voyageurs arrivant au Japon, est appelé VOC 202101/02 au Royaume-Uni.

[3] Ces deux équipes visent à développer un test RT-PCR qui utilise deux amorces, la première amplifie une région située à proximité de la délétion Δ69/70, la seconde cible une zone proche de la délétion 144. Ce test est développé à des fins de recherche. Toujours en développement, il n’est donc pas encore utilisable pour le diagnostic clinique.

[4] Une étude analysant le sérum de 44 patients Covid-19 convalescents pendant la première vague en Afrique du Sud a montré que plus de 90 % présentaient une diminution de la réponse en anticorps contre 501Y.V2 et que 48 % d’entre eux présentaient un échappement immunitaire complet vis-à-vis de ce variant. Des études évaluant l’immunité cellulaire (réponse T) sont en cours. Source : Update on Covid-19 epidemic & the 501Y.V2 variant in South Africa (Pr. Salim S. Abdool Karim)

Pour en savoir plus :

Davies NG, Barnard RC, Jarvis CJ, et al. Estimated transmissibility and severity of novel SARS-CoV-2 Variant of Concern 202012/01 in England. medRxiv. Posted December 26, 2020. doi: 10.1101/2020.12.24.20248822

Faria NR, Claro IM, Candido D, et al. Genomic characterisation of an emergent SARS-CoV-2 lineage in Manaus: preliminary findings. Virological. Posted January 12, 2021.

Fratev F. The N501Y and K417N mutations in the spike protein of SARS-CoV-2 alter the interactions with both hACE2 and human derived antibody: A Free energy of perturbation study. bioXriv. Posted December 31, 2020. doi: 10.1101/2020.12.23.424283

Galloway SE, Paul P, MacCannell DR, et al. Emergence of SARS-CoV-2 B.1.1.7 Lineage — United States, December 29, 2020–January 12, 2021. MMWR Morb Mortal Wkly Rep. ePub: 15 January 2021. doi: http://dx.doi.org/10.15585/mmwr.mm7003

Li Q, Wu J, Nie J, et al. The Impact of Mutations in SARS-CoV-2 Spike on Viral Infectivity and Antigenicity. Cell. 2020 Sep 3;182(5):1284-1294.e9. doi: 10.1016/j.cell.2020.07.012

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Xie XX, Zou, J, Fontes-Garfias CR, et al. Neutralization of N501Y mutant SARS-CoV-2 by BNT162b2 vaccine-elicited sera. BioRxiv. Posted January 07, 2021.doi: 10.1101/2021.01.07.425740

Sur le web :

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WHO. Weekly epidemiological update – 12 January 2021

WHO. Statement on the sixth meeting of the International Health Regulations (2005) Emergency Committee regarding the coronavirus disease (COVID-19) pandemic.

Avis du Conseil scientifique COVID-19. 12 janvier 2021. Ministère des Solidarités et de la Santé

Santé Publique France. COVID-19. Point épidémiologique hebdomadaire du 14 janvier 2021.

Brief report: New Variant Strain of SARS-CoV-2Identified in Travelers from Brazil. National Institute of Infectious Diseases, Japan. January  12,  2021.

COVID-19 Variant First Found in Other Countries and States Now Seen More Frequently in California. California Department of Public Health (CDPH)

B.1.1.7 report 2021-01-16 (cov-lineages.com)

B.1.351 report 2021-01-16 (cov-lineages.com)

P.1 report 2021-01-16 (cov-lineages.com)

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